L’instauration d’une bande de constructibilité par rapport aux voies publiques se retrouve dans de nombreux PLU et le Conseil d’Etat (CE, 20 octobre 2023, n° 463916) vient d’apporter d’intéressantes précisions sur les conditions de régularité pour instaurer une telle bande de constructibilité.
Le PLU de la Commune de Varennes-Jarcy prévoyait un article UB6 aux termes duquel « Dans la zone UB (hors secteur soumis à OAP), les constructions doivent s’implanter dans leur totalité dans une bande comprise entre 6 et 35 mètres de l’alignement des voies publiques existantes ou en projet »
La Cour Administrative d’Appel de Versailles, (CAA Versailles, 11 mars 2022, n° 19VE01170) a considéré que cette disposition était illégale au motif que « ces dispositions visent notamment à maintenir la présence de cœurs d’ilot inconstructibles, en lot arrière, afin de préserver des espaces de respiration dans le bourg et préserver l’identité urbaine, à savoir un bâti implanté en retrait des voies, sans double rideaux. Toutefois, l’objet de ces dispositions de l’article UB.6 du plan local d’urbanisme vise à règlementer le front bâti continu le long de la voie publique, afin de garantir la qualité esthétique du paysage urbain et non de déterminer l’implantation des constructions situées au second rang par rapport aux voies publiques. Dans ces conditions, M. et M B… sont fondés à soutenir que les dispositions précitées de l’article UB.6 sont entachées d’une erreur de droit en tant qu’elles fixent une règle d’implantation des constructions sur une bande comprise entre 6 et 35 mètres de l’alignement des voies publiques existantes ou en projet ».
Le Conseil d’Etat n’a pas entendu suivre la Cour et a rappelé que les articles L. 151-17 et L. 151-18 du Code de l’urbanisme permettent aux auteurs du PLU de fixer des règles d’implantation des constructions (L. 151-18) et des règles concernant « leurs conditions d’alignement sur la voirie et de distance minimale par rapport à la limite séparative et l’aménagement de leurs abords, afin de contribuer à la qualité architecturale, urbaine et paysagère, à la mise en valeur du patrimoine et à l’insertion des constructions dans le milieu environnant » (L. 151-18).
Sur la base d’une lecture conjuguée de ces deux articles, le Conseil d’Etat a ainsi considéré que :
« Il ressort du rapport de présentation du plan local d’urbanisme de Varennes-Jarcy qu’en se fondant sur les dispositions citées ci-dessus de l’article L. 151-17 du code de l’urbanisme pour édicter l’article UB 6, aux termes duquel : « Dans la zone UB (hors secteur soumis à OAP), les constructions doivent s’implanter dans leur totalité dans une bande comprise entre 6 et 35 mètres de l’alignement des voies publiques existantes ou en projet », la commune a entendu, d’une part, « limiter le développement anarchique des constructions afin de favoriser un fonctionnement urbain cohérent (accès et stationnement des nouvelles constructions) », fonctionnement urbain dont elle a estimé qu’il était caractérisé par un bâti implanté en retrait des voies, sans double rideau, et d’autre part, « maintenir la présence de cœurs d’îlot inconstructibles afin de préserver des espaces de respiration dans le bourg ». La définition d’une bande de constructibilité de 6 à 35 mètres assure que les constructions neuves seront implantées en retrait des voies. Si elle n’est pas de nature à empêcher toute construction neuve en double rideau, elle fait peser sur ce type de construction une contrainte susceptible d’en réduire l’occurrence. Elle assure enfin la préservation, au fond des parcelles de plus de 35 mètres de profondeur, d’îlots inconstructibles. Un tel article n’est illégal ni du seul fait qu’il n’assurerait qu’imparfaitement les objectifs en vue desquels il est édicté ni du fait que ses dispositions interdisant la construction dans les six premiers mètres de l’alignement des voies publiques, qui favorisent un alignement homogène des constructions sur la voirie, auraient également pu être prises, dans cette mesure, sur le fondement des dispositions citées ci-dessus de l’article L. 151-18 du même code ».
Le Conseil d’Etat concluait ainsi que la Cour avait commis une erreur de droit en considérant que l’article UB6 serait illégal aux motifs « qu’il aurait pour seul effet de règlementer le front bâti continu le long de la voie publique et qu’il ne viserait en réalité qu’à garantir la qualité esthétique du paysage urbain »
Sous réserve d’en justifier, les Communes disposent donc, au regard de cette décision du Conseil d’Etat, d’une large appréciation quant à la définition des bandes de constructibilité par rapport aux voies publiques.