Par un arrêt du 12 juin 2023, le Conseil d’Etat admet qu’un projet de construction situé le long du littoral, en continuité avec un secteur urbanisé issu d’une opération de lotissement, puisse être autorisé.
Conseil d’Etat, 1ère et 4ème chambres réunies, 12 juin 2023, Société Bouygues Immobilier, n°459918
Au sens de l’article L. 121-8 du Code de l’urbanisme applicable à l’aménagement et à la protection du littoral, « l’extension de l’urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants ».
Dans cet arrêt, la Haute juridiction devait apprécier les contours de la notion de « continuité avec les agglomérations et villages existants », et déterminer si la parcelle concernée par un projet de construction pouvait être considérée comme étant située en continuité avec une agglomération ou un village existants.
En l’espèce, un permis de construire avait été délivré par le maire de la Commune de Roquebrune-sur-Argens, en vue de la réalisation d’un immeuble de 46 logements sur un terrain jouxtant un lotissement, lui-même relativement éloigné du centre-ville historique du village.
La Cour administrative d’appel de Marseille avait déclaré l’autorisation d’urbanisme illégale au motif qu’un lotissement ne pouvait, selon la Cour, légalement être considéré comme caractérisant une agglomération ou village existants au sens de l’article L. 121-8 précité.
Toutefois, le Conseil d’Etat censure l’arrêt de la Cour administrative d’appel et affirme que :
« Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les secteurs déjà urbanisés caractérisés par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais qu’aucune construction ne peut en revanche être autorisée, même en continuité avec d’autres constructions, dans les espaces d’urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages. La nature de l’opération foncière ayant présidé à la création d’un secteur est sans incidence pour apprécier s’il caractérise une agglomération ou un village existant au sens de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme. Un projet de construction situé en continuité avec un secteur urbanisé issu d’une opération de lotissement peut, ainsi, être autorisé si le nombre et la densité des constructions de ce lotissement sont suffisamment significatifs pour qu’il caractérise une agglomération ou un village existant au sens de l’article L. 121-8 ».
Ainsi, la nature juridique du site sur lequel des constructions sont déjà présentes sur un terrain voisin de celui du projet ne constitue pas un critère pouvant être retenu pour caractériser une agglomération ou un village existants.
Même en zone littorale, un projet de construction sur un terrain situé dans le prolongement d’une zone abritant d’ores et déjà une densité significative de constructions peut dès lors être autorisé, sans que soit prises en considération d’une part la nature juridique des constructions préexistantes, et d’autre part l’éloignement du terrain avec le centre-ville de la commune :
« Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la cour, à laquelle il incombait seulement de rechercher si le nombre et la densité des constructions du secteur en continuité duquel se situait le projet étaient suffisamment significatifs, a commis une erreur de droit en prenant en considération la nature de l’opération foncière ayant présidé à la création de ce secteur et en jugeant à ce titre qu’un ” lotissement ” ne pouvait constituer une agglomération ou un village existant au sens de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme, de même, au demeurant, qu’en prenant en considération l’éloignement de ce secteur par rapport au centre historique de la commune, situé dans un autre secteur urbanisé ».
Lucas Marciot