La publication concomitante du rapport d’activité 2022 de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique et d’un guide aux fins de prévention des conflits d’intérêts par la Direction Générale des Collectivités Locales et la Direction des Affaires Criminelles et des Grâces souligne les difficultés d’application de la réforme dite « 3DS », notamment chez les élus locaux.
La loi 3DS du 21 février 2022 a introduit, à l’article L. 1111-6 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), une grille de lecture permettant d’apprécier les risques de nature pénale, déontologique et administrative, lorsqu’un élu représente, en application de la loi, sa collectivité au sein d’une personne morale de droit public ou de droit privé.
Ces dispositions, ainsi que les règles qui régissent de façon générale la transparence de la vie publique, poursuivent un objectif de sécurisation de la situation des élus, afin d’identifier en amont les zones « à risque » de conflit d’intérêts. Pour autant, il en résulte une plus grande complexité dans l’exercice quotidien des fonctions exécutives locales.
En témoigne notamment la publication du rapport d’activité 2022 de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique. En 2022, 69,1% des contrôles ont permis d’identifier des risques de conflit d’intérêts nécessitant d’adopter des mesures de prévention.
La HATVP souligne que le risque de commission du délit de prise illégale d’intérêts est élevé chez les élus départementaux et régionaux, « pour lesquels plus de neuf contrôles sur dix ont identifié des situations de conflit d’intérêts nécessitant la mise en œuvre de demandes de prévention ». Selon la Haute Autorité, la différence entre les décideurs publics locaux et nationaux s’explique par les spécificités mêmes de la vie publique locale. En effet, les élus locaux sont souvent investis dans le milieu associatif ou exercent en parallèle de leur mandat des activités professionnelles, ce qui présente un premier risque de conflit entre des intérêts publics et des intérêts privés.
Or des risques de conflits entre des intérêts publics divergents sont aussi à prendre en compte : « les élus sont également amenés à siéger, le plus souvent en qualité de représentants de leur collectivité, au sein de divers organismes « satellites », de nature publique ou parapublique, ou bien ils détiennent des délégations de signature ou de fonctions dans des domaines pour lesquels ils ont déjà une expérience significative ». Dans ces organismes « satellites », les élus peuvent être tentés de favoriser un territoire en raison de leurs propres attaches électorales, engendrant in fine des choix au détriment des principes d’égalité et d’impartialité inhérents à l’intérêt public. Pour autant, la HATVP relève que la notion de conflit entre intérêts publics « continue de faire l’objet d’une difficile appropriation ».
En parallèle, la Haute Autorité note une augmentation significative des mises en demeure pour non déclaration des mobilités professionnelles entre le secteur public et le secteur privé.
Néanmoins, plusieurs outils sont mis à la disposition des élus afin de les aider à prévenir les situations de conflit d’intérêts. Tout d’abord, la Direction Générale des Collectivités Locales et la Direction des Affaires Criminelles et des Grâces ont publié un guide, sous la forme d’une foire aux questions, à ce sujet.
L’obligation de recruter des référents déontologues au sein de plusieurs collectivités pourra également apporter une réponse aux interrogations des élus dans l’exercice de leurs fonctions.
Enfin, la HATVP a fait paraitre, sous la forme d’un tableau, sa doctrine en matière de conflits d’intérêts et d’obligation de déports pour les élus désignés dans des organismes extérieurs.