Si le principe d’instaurer une réglementation pour les meublés de tourisme est expressément prévu par la loi (article L. 631-7 et suivants du Code de la construction et de l’habitation), et que la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE, 22 septembre 2020 – Cali Apartments SCI – n° C-724/18 et HX n° C-727/18) a validé le principe, pour les autorités nationales d’adopter de telles réglementations, il revient néanmoins au juge administratif de contrôler si cette réglementation est d’une part justifiée par une raison supérieure d’intérêt général tenant à la lutte contre la pénurie de logements destinés à la location longue durée et, d’autre part, proportionnée à l’objectif poursuivi, en ce que celui-ci ne peut pas être réalisé par une mesure moins contraignante.
Le Tribunal Administratif de Melun (TA Melun, 31 octobre 2022, n° 2208697) dans le cadre d’une procédure de référé suspension a apporté d’intéressantes précisions sur les justifications que la Collectivité doit apporter pour recourir au principe même de l’instauration d’une telle réglementation.
Dans cette affaire, la Communauté Val d’Europe Agglomération avait instauré un règlement intercommunal fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage. Le Tribunal a tout d’abord considéré que le requérant (une société dont l’activité de location de meublés de courte durée représente 45 % de son chiffre d’affaires) justifiait de l’urgence à voir cette réglementation suspendue.
Il a, en second lieu, considéré que la Communauté d’Agglomération ne démontrait pas que « la défense des intérêts liés à la préservation du logement destiné à la location de longue durée sur le territoire du Val d’Europe implique l’adoption d’une réglementation contraignante du type de celle contestée ». Le Tribunal a considéré que la Communauté d’Agglomération ne démontrait pas que l’augmentation du nombre de locations de meublés de tourisme aurait entraîné une pénurie de logements en location loyer longue durée.
Le Tribunal considère qu’il existe un doute sérieux sur la légalité de la réglementation en cause, dès lors que la Communauté d’Agglomération ne démontrerait pas, de manière probante, une pénurie de logements, en location longue durée sur le territoire, ni que cette éventuelle pénurie serait liée à une augmentation du nombre de meublés de tourisme.
Ainsi le Tribunal Administratif de Melun a suspendu l’exécution du règlement intercommunal, en remettant, en fin de compte, en cause le principe même de cette réglementation, en considérant que la justification d’une raison supérieure d’intérêt général liée à une pénurie de logements, n’était pas démontrée sur son territoire.
Cette décision reste à devoir être confirmée au fond, mais elle doit inciter les collectivités souhaitant instaurer de telles réglementations à pouvoir justifier, chiffres à l’appui, du bien-fondé même et de la nécessité impérieuse d’avoir à instaurer une telle réglementation sur leur territoire.