Le Conseil d’Etat vient d’estimer que le dépôt tardif du compte de campagne ne devait pas nécessairement avoir pour conséquence la déclaration d’inéligibilité, et en cas d’élection, la démission d’office, en l’absence d’autre irrégularité affectant le compte de campagne.
Par un arrêt en date du 18 octobre dernier, la Haute Juridiction a censuré le jugement prononcé par le Tribunal Administratif de Toulouse en première instance, qui avait prononcé l’inéligibilité et la démission d’office d’un binôme de candidats aux élections départementales des 20 et 27 juin 2021, au motif du non-respect du délai de dépôt de leur compte de campagne.
Conseil d’Etat, 18 octobre 2022, n°463156
Le Tribunal Administratif de Toulouse, sur saisine de la Commission Nationale des Comptes de Campagne et des Financements Politiques (CNCCFP) ayant constaté le dépôt tardif du compte de campagne du binôme de candidats en question, avait, en effet, considéré qu’il avait été saisi à bon droit, en application de l’article L. 52-15 du Code électoral. En conséquence, il avait, d’une part, prononcé l’inéligibilité du binôme de candidats pour une durée de douze mois et, d’autre part, l’avait déclaré démissionnaire d’office.
Mais, le Conseil d’Etat a constaté que si le délai légal de dépôt du compte de campagne n’avait, certes, pas été respecté, les deux candidats avaient tout de même fait le nécessaire sitôt effectuées l’ensemble des opérations bancaires relatives à la campagne électorale et clôturé leur compte bancaire dédié.
La Haute Juridiction a également relevé que la version du compte de campagne déposée depuis lors par les candidats, compte certifié par un membre de l’ordre des experts comptables – ce qui n’était pas le cas auparavant – ne différait pas dans ses éléments et dans son contenu de celle initialement présentée à la CNCCFP. Le compte contenait ainsi l’ensemble des justificatifs des recettes et des dépenses afférentes ; la CNCCFP n’ayant relevé aucune autre irrégularité que la tardiveté du dépôt du compte.
Le Conseil d’Etat jugeant que les dépenses du compte de campagne était d’un faible montant et que le manquement constaté n’était pas délibéré, en conclut que les candidats concernés ne devaient pas être déclarés inéligibles, ni démissionnaires d’office.
Cette décision illustre, s’il en était encore besoin, la marge de manœuvre qui est celle du juge électoral face aux risques d’éventuelles déclarations d’inéligibilité et de démission d’office de candidats pour non-respect de dispositions du Code électoral, pour lesquelles il entend conserver un véritable pouvoir d’appréciation.