Pour le Conseil d’État, aucune disposition législative ou réglementaire n’impose à un fonctionnaire d’informer la collectivité publique auprès de laquelle il postule de l’existence d’une enquête pénale le mettant en cause.
Conseil d’État, 30 décembre 2021, n°441863
Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du Conseil d’État, une fonctionnaire de la Commune de Verneuil-sur-Seine (Yvelines), qui occupait les fonctions de gestionnaire des finances municipales, avait postulé auprès de la Commune de Linas (Essonne) afin d’occuper, par voie de mutation, le poste vacant de responsable des finances de cette commune.
La Commune de Linas a fait connaître son accord pour la recruter le 11 janvier 2012 et, par courrier du 1er février 2012, la Commune de Verneuil-sur-Seine a informé qu’elle ne s’opposait pas à la mutation de son agent.
En parallèle de cette procédure de mutation, la fonctionnaire concernée, qui avait fait l’objet, le 30 décembre 2011, d’une citation à comparaître par le procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Chartres, a été condamnée le 9 janvier 2012 par ce Tribunal à une peine de prison avec sursis pour abus de confiance commis dans l’exercice de précédentes fonctions auprès d’un comité des œuvres sociales d’une autre commune, sans inscription de cette condamnation au bulletin n° 2 du casier judiciaire.
Néanmoins, informée de cette condamnation, la Commune de Linas a décidé de ne pas donner suite au recrutement de l’agent par voie de mutation et en a informé l’intéressée et sa collectivité d’origine par courriers du 10 février 2012.
L’agent a demandé au Tribunal Administratif de Versailles la condamnation de la Commune de Linas à réparer les préjudices qu’elle a subis du fait de l’illégalité de la décision mettant fin à la procédure de recrutement.
La Cour administrative d’appel de Versailles a confirmé le jugement du Tribunal Administratif de Versailles, qui avait rejeté les demandes de l’agent, en estimant que la décision de procéder à son recrutement avait été obtenue par fraude au motif qu’elle avait dissimulé à la Commune de Linas qu’elle faisait l’objet d’une enquête pénale pour abus de confiance portant sur des faits commis dans l’exercice de fonctions analogues. Pour la Cour, ce comportement caractérisait un manquement au devoir de probité auquel elle était tenue en sa qualité d’agent public justifiant le retrait de cette décision de recrutement.
Le Conseil d’État a annulé l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Versailles au motif que :
« aucune disposition législative ou réglementaire ne faisant obligation à un fonctionnaire d’informer la collectivité publique auprès de laquelle il postule dans le cadre d’une procédure de mutation de l’existence d’une enquête pénale le mettant en cause, il ne peut être regardé comme ayant commis une fraude en n’en faisant pas état. »
Ainsi, selon le Conseil d’État, un fonctionnaire n’a aucune obligation d’informer la collectivité auprès de laquelle il postule des poursuites pénales dont il fait l’objet et le fait qu’il ait dissimulé cette information ne permet pas de considérer que son recrutement par voie de mutation a été obtenu par fraude.
Le Conseil d’État a donc annulé l’arrêt et a renvoyé le jugement de l’affaire à la Cour Administrative d’Appel de Versailles à qui il appartiendra de se prononcer sur l’indemnisation éventuelle des préjudices subis par l’agent.