Dans un arrêt du 28 octobre 2021, le Conseil d’Etat a rappelé qu’étaient soumis à une évaluation environnementale les plans et programmes susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement. Ainsi, les plans de prévention du bruit dans l’environnement sont exclus de cette obligation, contrairement aux plans d’exposition au bruit des aérodromes qui y sont, eux, soumis.
Conseil d’Etat, 28 octobre 2021, n°447123
Dans cette affaire, par une demande en date du 1er août 2020, l’association de défense contre les nuisances aériennes a demandé au Premier ministre de prendre toute mesure réglementaire pour soumettre à une évaluation environnement préalable les plans d’exposition au bruit des aérodromes ainsi que les plans de prévention du bruit dans l’environnement des aérodromes.
Sans réponse de la part du Premier Ministre, l’association a saisi le Conseil d’Etat d’une requête visant à annuler la décision implicite de rejet du Premier Ministre.
En premier lieu, le Conseil d’Etat rappelle que selon une jurisprudence établie de la Cour de justice de l’Union européenne, ainsi qu’aux termes des dispositions de l’article 3 de la directive 2001/42/CE du Parlement européen en date du 13 décembre 2011, les plans et programme soumis à une évaluation environnementale sont ceux qui :
- Établissent, « en définissant des règles et des procédures, un ensemble significatif de critères et de modalités pour la mise en œuvre d’un ou de plusieurs projets» ;
- « définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre d’autres projets pourra être autorisée à l’avenir, lorsqu’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement».
En droit français, ces dispositions sont reprises par l’article L. 122-4 du code de l’environnement qui précise :
« II. – Font l’objet d’une évaluation environnementale systématique :
– 1° Les plans et programmes qui sont élaborés dans les domaines de l’agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l’énergie, de l’industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l’eau, des télécommunications, du tourisme ou de l’aménagement du territoire et qui définissent le cadre dans lequel les projets mentionnés à l’article L. 122-1 pourront être autorisés ; (…)
III. – Font l’objet d’une évaluation environnementale systématique ou après examen au cas par cas par l’autorité environnementale :
– 1° Les plans et programmes mentionnés au II qui portent sur des territoires de faible superficie s’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ;
– 2° Les plans et programmes, autres que ceux mentionnés au II, qui définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre de projets pourra être autorisée si ces plans sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement (…) ».
En second lieu, à la lumière de ces précisions, le Conseil d’Etat opère une distinction entre, d’une part, les plans de prévention du bruit dans l’environnement, et, d’autre part, les plans d’exposition au bruit des aérodromes.
Les plans de prévention du bruit dans l’environnement sont définis aux termes des dispositions de l’article L. 572-6 du code de l’environnement :
« Les plans de prévention du bruit dans l’environnement tendent à prévenir les effets du bruit, à réduire, si nécessaire, les niveaux de bruit, ainsi qu’à protéger les zones calmes. Les zones calmes sont des espaces extérieurs remarquables par leur faible exposition au bruit, dans lesquels l’autorité qui établit le plan souhaite maîtriser l’évolution de cette exposition compte tenu des activités humaines pratiquées ou prévues.
Ils comportent une évaluation du nombre de personnes exposées à un niveau de bruit excessif et identifient les sources des bruits dont les niveaux devraient être réduits.
Ils recensent les mesures prévues par les autorités compétentes pour traiter les situations identifiées par les cartes de bruit et notamment lorsque des valeurs limites fixées dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat sont dépassées ou risquent de l’être.»
Le Conseil d’Etat considère que les plans de prévention du bruit dans l’environnement « se bornent à recenser les actions déjà engagées ou prévues au titre de la lutte contre les nuisances sonores, avec l’accord des autorités compétentes pour leur mise en œuvre, et à définir le cadre de mise en œuvre de travaux ou projets ».
Ainsi, le Conseil d’Etat juge qu’ils « ne sont donc pas au nombre des plans et programme au sens de l’article L. 122-4 du code de l’environnement (…) qui doivent être soumis à une évaluation environnementale préalable ».
A contrario, les plans d’exposition au bruit des aérodromes sont envisagés notamment par les dispositions de l’article L 112-6 du code de l’urbanisme, aux termes desquelles :
« Pour l’application des prescriptions édictées par la présente section, un plan d’exposition au bruit est établi pour chacun des aérodromes mentionnés à l’article L. 112-5.
Le plan d’exposition au bruit est annexé au plan local d’urbanisme, au plan de sauvegarde et de mise en valeur et à la carte communale ».
Ces dispositions sont complétées par l’article L. 112-7 du même code :
« Le plan d’exposition au bruit comprend un rapport de présentation et des documents graphiques.
Il définit, à partir des prévisions de développement de l’activité aérienne, de l’extension prévisible des infrastructures et des procédures de circulation aérienne, des zones diversement exposées au bruit engendré par les aéronefs.
Il les classe en fonction de l’intensité décroissante du bruit en zones A et B, dites zones de bruit fort, C, dite zone de bruit modéré, et D. Ces zones sont définies en fonction des valeurs d’indices évaluant la gêne due au bruit des aéronefs fixées par décret en Conseil d’Etat.
La délimitation d’une zone D est facultative à l’exception des aérodromes mentionnés au I de l’article 1609 quatervicies A du code général des impôts ».
Le Conseil d’Etat juge ainsi qu’il résulte de ces dispositions :
« qu’au voisinage des aérodromes, les plans ‘exposition au bruit délimitent des zones géographiques en fonction de leur exposition au bruit des aéronefs (…)
Par ailleurs, par celle délimitation, ils déterminent les conditions d’utilisation des sols, qui s’imposent aux projets de construction et d’aménagement »
Dès lors, « ces plans doivent, en conséquence, être regardés comme définissant, le cadre d’autorisation et de mise en œuvre de projet et comme devant faire l’objet d’une évaluation environnementale ». Le Conseil d’Etat précise en outre que seuls les aérodromes mentionnés à l’article 1609 quatervicies A du code général des impôts sont concernés par cette obligation.