Le Conseil d’État a rendu un avis contentieux dans lequel il indique que les dispositions du code de l’environnement relatives à l’abattage des arbres (protection des allées et alignements d’arbres) sont applicables pour instruire et délivrer les autorisations d’urbanisme.
Conseil d’État, 21 juin 2021, n° 446662
L’association La Nature en Ville et le collectif Les Citoyens Affranchis ont demandé au tribunal administratif de Rennes d’annuler l’arrêté du 3 avril 2019 par lequel le maire de Renne a délivré à la métropole de Rennes un permis d’aménager la voirie et l’arrêté du 17 septembre 2019 autorisant l’abattage de quatre arbres.
Par un jugement n° 1905192 du 19 novembre 2020 et en application de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, le tribunal administratif de Rennes a sursis à statuer et a transféré le dossier au Conseil d’État en lui soumettant deux questions :
- La légalité d’un permis d’aménager portant sur des travaux impliquant l’abattage d’arbres inclus dans une allée ou un alignement d’arbres bordant une voie de communication peut-elle être directement appréciée au regard des dispositions de l’article L. 350-3 du code de l’environnement ?
- Dans l’affirmative, le permis d’aménager peut-il être regardé comme valant par lui-même dérogation accordée par l’autorité administrative compétente sur le fondement de l’article L. 350-3 du code de l’environnement, ou sa délivrance doit-elle être différée, dans l’attente de celle de la dérogation, en particulier lorsque l’autorité compétente à cet égard n’est pas celle qui délivre le permis ?
Le Conseil d’État a d’abord rappelé que l’article 172 de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a créé l’article L. 350-3 du code de l’environnement, qui dispose que :
« Les allées d’arbres et alignements d’arbres qui bordent les voies de communication constituent un patrimoine culturel et une source d’aménités, en plus de leur rôle pour la préservation de la biodiversité et, à ce titre, font l’objet d’une protection spécifique. Ils sont protégés, appelant ainsi une conservation, à savoir leur maintien et leur renouvellement, et une mise en valeur spécifiques.
Le fait d’abattre, de porter atteinte à l’arbre, de compromettre la conservation ou de modifier radicalement l’aspect d’un ou de plusieurs arbres d’une allée ou d’un alignement d’arbres est interdit, sauf lorsqu’il est démontré que l’état sanitaire ou mécanique des arbres présente un danger pour la sécurité des personnes et des biens ou un danger sanitaire pour les autres arbres ou bien lorsque l’esthétique de la composition ne peut plus être assurée et que la préservation de la biodiversité peut être obtenue par d’autres mesures.
Des dérogations peuvent être accordées par l’autorité administrative compétente pour les besoins de projets de construction.
Le fait d’abattre ou de porter atteinte à l’arbre, de compromettre la conservation ou de modifier radicalement l’aspect d’un ou de plusieurs arbres d’une allée ou d’un alignement d’arbres donne lieu, y compris en cas d’autorisation ou de dérogation, à des mesures compensatoires locales, comprenant un volet en nature (plantations) et un volet financier destiné à assurer l’entretien ultérieur. »
Ensuite, le Conseil d’État est venu préciser que lorsqu’un permis de construire ou d’aménager, ou une décision de non-opposition à déclaration préalable porte sur un projet impliquant l’atteinte ou l’abattage d’arbres composant une allée ou un alignement le long d’une voie de communication, il résulte des dispositions combinées des articles L. 421-6, R. 111-26 et R. 111-27 du code de l’urbanisme et de l’article L. 350-3 du code de l’environnement que cette décision vaut octroi de la dérogation prévue par le troisième alinéa de l’article L. 350-3 du code de l’environnement.
Aussi et en pareil cas, il appartient à l’autorité administrative compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme ou statuer sur la déclaration préalable de s’assurer de la nécessité de l’abattage ou de l’atteinte portée aux arbres pour les besoins du projet de construction et de l’existence de mesures de compensation appropriées et suffisantes à la charge du pétitionnaire ou du maitre d’ouvrage.
Par conséquent et dans ce cas, il apparait que le principe d’indépendance des législations n’a pas vocation à s’appliquer et les dispositions du code de l’environnement sont immédiatement applicables aux services instructeurs, dans l’appréciation des autorisations d’urbanisme ou déclarations préalables.