Dans un arrêt du 9 juin 2021, le Conseil d’État a confirmé que les pouvoirs conférés au juge dans le cadre d’un recours en contestation de la validité du contrat sont bien ceux d’un juge de pleine juridiction et qu’il peut donc statuer ultra petita, en annulant le contrat alors même qu’il n’était saisi que d’une demande de résiliation.
Dans le cadre de la passation d’un marché public ayant pour objet une mission d’assistance à maîtrise d’ouvrage et d’accompagnement juridique pour la construction et la gestion d’un crématorium, un candidat évincé a saisi le juge administratif d’une demande de résiliation du contrat. Sa requête a été rejetée en première instance ainsi qu’en appel.
Pour rejeter la requête d’appel, la Cour administrative d’appel de Bordeaux avait considéré que les conclusions tendant à l’annulation du contrat, présentées pour la première fois en appel, étaient irrecevables dès lors que le requérant avait sollicité en première instance uniquement la résiliation du contrat.
Le Conseil d’État a censuré cette analyse, en se fondant sur le considérant de principe issu de son arrêt d’Assemblée Département Tarn-et-Garonne du 4 avril 2014, par lequel les tiers sont désormais susceptibles d’exercer un recours de pleine juridiction devant le juge du contrat en contestation de la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Il a ainsi rappelé que :
« Saisi d’un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses par un tiers justifiant que la passation de ce contrat l’a lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine, il appartient au juge du contrat, en présence d’irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l’exécution du contrat, de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l’intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s’il se trouve affecté d’un vice de consentement ou de tout autre vice d’une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d’office, l’annulation totale ou partielle de celui-ci. »
Et d’ajouter que :
« Il résulte de ce qui précède que le juge du contrat saisi par un tiers de conclusions en contestation de la validité du contrat ou de certaines de ses clauses dispose de l’ensemble des pouvoirs mentionnés au point précédent et qu’il lui appartient d’en faire usage pour déterminer les conséquences des irrégularités du contrat qu’il a relevées, alors même que le requérant n’a expressément demandé que la résiliation du contrat.»
Le juge ne pouvait en conséquence considérer que les conclusions nouvelles en appel tendant à l’annulation du contrat étaient irrecevables au motif que seule la résiliation du contrat avait été sollicitée en première instance, l’ensemble de ces demandes tendant à la contestation de la validité du contrat et permettant au juge, en première instance ou en appel, de prononcer son annulation.
Le Conseil d’État a donc annulé l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Bordeaux pour erreur de droit et lui a renvoyé l’affaire.