Dans cette affaire, cinq anciens élus municipaux (maire, adjoints, conseillers municipaux délégués), défendus par le Cabinet ITINERAIRES AVOCATS, « bataillaient » contre la Commune, qui leur réclamait, titre exécutoire à l’appui, le remboursement des indemnités de fonctions perçues sur la période 2011-2014 (sommes se chiffrant à plusieurs dizaines de milliers d’euros pour certains…).
La cause du litige ? Un déféré du préfet qui avait conduit le tribunal administratif, en juillet 2014, à annuler la délibération par laquelle, en mars 2011, le conseil municipal avait fixé le montant des indemnités de fonctions du maire, des adjoints et des conseillers municipaux bénéficiant d’une délégation de fonctions.
A la suite de ce jugement, le nouveau maire de la commune s’était cru fondé à émettre des titres exécutoires contre l’équipe de son prédécesseur, pour demander le remboursement des indemnités de fonctions ainsi perçues de 2011 à 2014, sur la base d’une délibération annulée en justice.
Mais la juridiction administrative en juge autrement. La Cour Administrative de Versailles, par cinq décisions en date du 22 janvier 2021, confirme le jugement de première instance, et donne raison aux élus.
En effet, la solution s’appuie sur le principe dégagé par le Conseil d’Etat (CE, 13 décembre 2017, CCAS d’Aimargues, n°393466) :
« Sous réserve des dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l’administration ne peut retirer une décision individuelle créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. Une décision administrative explicite accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l’administration avait l’obligation de refuser cet avantage. Il en va de même, dès lors que le bénéfice de l’avantage en cause ne résulte pas d’une simple erreur de liquidation ou de paiement, de la décision de l’administration accordant un avantage financier qui, sans avoir été formalisée, est révélée par les circonstances de l’espèce, eu égard notamment à la situation du bénéficiaire et au comportement de l’administration ».
Ce principe étant appliqué au cas d’espèce, la Cour retient que l’indemnité a été versée mensuellement par la Commune, de 2011 à 2014, pendant la durée de l’exercice des fonctions, sur la base d’une délibération, même annulée. Par suite, le versement de ces indemnités de fonctions ne résultait pas d’une simple erreur de liquidation ou de paiement de la part de l’administration. Il s’agissait bien d’une décision individuelle créatrice de droit, qui ne pouvait plus être retirée au-delà du délai de quatre mois, en application de la bien-connue jurisprudence Ternon (CE Ass., 26 octobre 2001, n°197018).
La Cour confirme donc l’annulation des titres exécutoires, et décharge les élus de toute obligation de remboursement.