Un transfert acté par la loi LOM du 24 décembre 2019
La loi n°2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités, dite loi LOM, est venue réformer significativement le dispositif applicable en matière de mobilité et a posé de nouvelles obligations. L’objectif affiché par la loi visait tout particulièrement à mettre un terme aux « zones blanches » en termes de mobilité.
La loi a eu pour effet :
- D’une part, de confirmer et de conforter les Métropoles, les Communautés urbaines et les Communautés d’agglomération, dans leur mission d’autorités organisatrices de la mobilité (AOM),
- D’autre part, et c’est une novation majeure, elle est venue imposer aux Communautés de communes de se doter d’une telle compétence, à défaut de quoi, la Région deviendra AOM locale par substitution sur leur territoire.
Plus précisément, en application de l’article 8 de la loi LOM, dans sa version initiale, il était laissé un délai aux Communautés de communes dans lequel elles devaient, par délibération expresse, se prononcer, délai expirant, initialement, le 31 décembre 2020.
A défaut de prise de compétence, dans ce délai, le mécanisme de substitution prévu par la loi, en faveur de la Région devait pleinement trouver à s’appliquer. Dans une telle hypothèse, le transfert de compétence, prononcé par arrêté préfectoral, devait prendre effet au plus tard au 1er juillet 2021.
Un transfert dont le calendrier a été bouleversé par l’épidémie de Covid-19
Le calendrier a cependant été revu et corrigé en raison de la crise sanitaire. Ainsi, l’article 9 III de l’ordonnance n°2020-391 du 1er avril 2020 visant à assurer la continuité du fonctionnement des institutions locales et de l’exercice des compétences des collectivités territoriales et des établissements publics locaux afin de faire face à l’épidémie de COVID 19, a reporté au 31 mars 2021 le délai d’adoption de la délibération relative à la prise de compétence d’organisation des mobilités.
Toutefois, si la date à laquelle les Communauté de communes devaient obligatoirement se prononcer a été modifiée, passant du 31 décembre 2020 au 31 mars 2021, la date d’effet du transfert est, quant à elle restée inchangée, et demeure celle du 1er juillet 2021.
L’échéance du 31 mars 2021 en débat ?
Relevons que le calendrier du transfert de compétence, revu par l’ordonnance du 1er avril 2020, fait de nouveau débat.
Une proposition de loi a, en effet, été déposée en ce sens, par un certain nombre de sénateurs, le 13 octobre 2020.
Cette proposition de loi vise à reporter la date de deux transferts de compétences entre les collectivités territoriales et leurs groupements à la suite de l’épidémie de Covid-19, à savoir, d’une part, la compétence Plan local d’urbanisme, et d’autre part, la compétence Mobilités.
Ainsi, dans le cadre de cette proposition de loi, pour ce qui est de la compétence Mobilités, la date à laquelle les Communauté de communes devraient obligatoirement se prononcer serait repoussée, pour être fixée au 31 août 2021.
En outre, et contrairement à l’ordonnance du 1er avril 2020, la proposition prévoit que la date d’effet du transfert serait, cette fois-ci modifiée, et ce dernier interviendrait le 1er janvier 2022.
Reste à savoir quel sera le sort de cette proposition de loi… En effet, si le report de la compétence PLU a finalement été acté par la loi n°2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire, tel n’a pas été le cas pour la compétence Mobilité.
En effet, insérée en première lecture (article 3 octies) à l’initiative des sénateurs, le report du transfert de la compétence Mobilité n’a pas été entériné par les députés, en nouvelle lecture (article 3 octies).
Adopté une nouvelle fois par les sénateurs en nouvelle lecture (article 3 octies), le report de la compétence s’est heurté à un refus définitif des députés, en dernière lecture (article 7).
C’est dans un tel contexte que Madame Françoise GATEL et Monsieur Charles GUENE, Sénateurs, respectivement, Présidente et Vice-Président de la Délégation aux Collectivités Territoriales et à la Décentralisation, ont, par lettre en date du 16 novembre dernier, saisi Monsieur le Premier Ministre et les Ministres concernés, afin de solliciter un report d’un an des modalités de prise de la compétence Mobilité, telle qu’initialement prévue par la loi LOM.
Pour l’heure, aucune suite n’a, semble-t-il, été apportée à cette lettre.
Ainsi, en l’état, la date butoir du 31 mars 2021 pour l’adoption d’une délibération par les Communautés de communes et l’échéance du 1er juillet 2021 pour la date d’effet du transfert de compétence restent bel et bien d’actualité.
Focus sur la procédure de transfert
L’article 8 de la loi LOM prévoit que le Conseil communautaire et les Conseils municipaux de ses Communes membres se prononcent sur le transfert de la compétence Mobilité dans les conditions prévues aux deuxième et troisième alinéas de l’article L.5211-17 du CGCT.
Ainsi, le transfert doit être décidé par délibérations concordantes du Conseil communautaire et des Conseils municipaux se prononçant dans les conditions de majorité requise pour la création de l’EPCI.
Rappelons qu’en application des dispositions de l’article L.5211-5 du CGCT, cet accord doit être exprimé par deux tiers au moins des Conseils municipaux des Communes intéressées représentant plus de la moitié de la population totale de celles-ci, ou par la moitié au moins des Conseils municipaux des Communes représentant les deux tiers de la population.
En outre, cette majorité doit nécessairement comprendre, en l’espèce, l’accord du Conseil municipal de la Commune dont la population est la plus nombreuse, lorsque celle-ci est supérieure au quart de la population totale concernée.
Le Conseil municipal de chaque Commune membre dispose ensuite d’un délai de trois mois, à compter de la notification au Maire de la Commune de la délibération de l’organe délibérant de l’EPCI, pour se prononcer sur les transferts proposés. A défaut de délibération dans ce délai, sa décision est réputée favorable.
Le transfert de compétence est ensuite acté par arrêté préfectoral, si les conditions de majorité nécessaires sont atteintes.
Ainsi, il appartient donc, dans un tel cadre, aux Communes membres des Communautés de communes concernées, d’opérer (ou non) un tel transfert de la compétence Mobilité, et ce, dans le cadre du droit commun de l’extension des compétences (délibération du Conseil Communautaire / notification aux Communes / accord de la majorité qualifiée des Communes / arrêté préfectoral portant extension de compétence).
Une nouvelle donne en matière de Mobilités
Il est ici utile de rappeler que l’AOM, personne publique, a pour mission principale d’organiser la mobilité sur son territoire, c’est-à-dire non seulement d’animer la politique de la mobilité en coordonnant les divers acteurs du secteur, mais aussi de contribuer aux objectifs environnementaux, donc de lutte contre la pollution de l’air, les changements climatiques, ou encore de lutte contre la pollution sonore…autant de facteurs qu’il lui appartient de prendre en compte.
En outre, la compétence AOM est précisément définie à l’article L. 1231-1-1 du Code des transports, dans ses diverses composantes.
Ainsi, en application de ces dispositions, l’AOM est compétente pour :
1° Organiser des services réguliers de transport public de personnes ;
2° Organiser des services à la demande de transport public de personnes ;
3° Organiser des services de transport scolaire définis aux articles L. 3111-7 à L. 3111-10, dans les cas prévus au quatrième alinéa de l’article L. 3111-7 et à l’article L. 3111-8 ;
4° Organiser des services relatifs aux mobilités actives définies à l’article L. 1271-1 ou contribuer au développement de ces mobilités ;
5° Organiser des services relatifs aux usages partagés des véhicules terrestres à moteur ou contribuer au développement de ces usages ;
6° Organiser des services de mobilité solidaire, contribuer au développement de tels services ou verser des aides individuelles à la mobilité, afin d’améliorer l’accès à la mobilité des personnes se trouvant en situation de vulnérabilité économique ou sociale et des personnes en situation de handicap ou dont la mobilité est réduite.
En outre, les AOM peuvent, également exercer les missions suivantes :
1° Offrir un service de conseil et d’accompagnement individualisé à la mobilité destiné aux personnes se trouvant en situation de vulnérabilité économique ou sociale ainsi qu’à celles en situation de handicap ou dont la mobilité est réduite ;
2° Mettre en place un service de conseil en mobilité destiné aux employeurs et aux gestionnaires d’activités générant des flux de déplacements importants ;
3° Organiser ou contribuer au développement des services de transport de marchandises et de logistique urbaine, en cas d’inexistence, d’insuffisance ou d’inadaptation de l’offre privée, afin de réduire la congestion urbaine ainsi que les pollutions et les nuisances affectant l’environnement.
De plus, les AOM :
- Assurent la planification, le suivi et l’évaluation de leur politique de mobilité, et associent à l’organisation des mobilités l’ensemble des acteurs concernés ;
- Contribuent aux objectifs de lutte contre le changement climatique, la pollution de l’air, la pollution sonore et l’étalement urbain.