Par une décision rendue le 11 décembre 2020, le Conseil d’Etat est venue trancher la question des menus de substitution dans les cantines scolaires en jugeant qu’il n’existait ni interdiction, ni obligation de mettre en place de tels menus de substitution, mais que, lorsqu’ils existent, leur suppression ne peut être motivée que par des raisons d’organisation du service et non au nom de la laïcité et de la neutralité du service public.
La Cour Administrative d’Appel de Lyon s’était prononcée, le même jour, dans deux affaires relatives à la question des menus, pudiquement dits « de substitution », pour ne pas dire « sans porc ».
Dans la première affaire, le requérant avait demandé qu’il soit mis fin à la pratique des « repas de substitution », instaurée par la Commune de Voglans (73) dans sa cantine scolaire depuis 1989, au nom du principe de laïcité et du principe de neutralité du service public. La Cour Administrative d’Appel de Lyon (CAA Lyon, n° 16LY03088, 23/10/2018) a confirmé le jugement du Tribunal Administratif de Grenoble en rappelant que les principes de neutralité et de laïcité ne faisaient pas obstacles à ce que les « usagers de la restauration scolaire se voient offrir un choix leur permettant de bénéficier d’un menu équilibré sans avoir à consommer des aliments proscrits par leurs convictions religieuses ou philosophiques ». Il n’y a donc pas d’interdiction d’un menu dit « de substitution » !
Dans la seconde affaire, l’association requérante contestait la décision du Maire de Chalon-Sur-Saône de supprimer le menu de substitution proposé depuis 1984. La Cour Administrative d’Appel de Lyon (CAA Lyon, n° 17LY03323, 23/10/2018) après avoir rappelé que le service de restauration scolaire reste un service public administratif facultatif, et donc non obligatoire, a précisé que le gestionnaire de ce service public, ici la Commune, « ne peut toutefois décider d’en modifier les modalités d’organisation et de fonctionnement que pour des motifs en rapport avec les nécessités du service ». La Cour a ainsi considéré « qu’en se fondant exclusivement sur le principe de laïcité et de neutralité du service public pour décider de mettre un terme à une telle pratique, le Maire et le Conseil Municipal ont entaché leurs décisions d’une erreur de droit ». Il n’y a pas d’obligation d’instaurer un repas de substitution, mais lorsqu’il existe, on ne peut le supprimer que pour des motifs liés à l’organisation du service et non au nom de la laïcité !
Cette affaire a été portée devant le Conseil d’Etat (CE, n° 426483, 11/12/2020), qui a confirmé la décision de la Cour Administrative d’Appel de Lyon, en rappelant qu’il n’existe aucune obligation d’instaurer un repas de substitution et que les usagers n’ont aucun droit à exiger un tel repas de substitution, mais que les principes de laïcité, de neutralité et d’égalité des usagers devant le service public ne font pas obstacles à ce que les « collectivités territoriales puissent proposer de tels repas ».
La Haute Assemblée a ainsi considéré que la Commune ne démontrait pas que « la mise en place des menus de substitution avait entraîné, par le passé, des difficultés particulières » et que la Commune ne pouvait décider de modifier les modalités d’organisation que pour des « motifs en rapport avec les nécessités du service » et non pour des motifs de laïcité et de neutralité du service public.
En conclusion, ni interdiction, ni obligation de mettre en place des menus de substitution, mais lorsqu’ils existent, leur suppression ne peut être motivée que par des raisons d’organisation du service et non au nom de la laïcité et de la neutralité du service public.