La Métropole de Lyon a procédé à l’expropriation d’un immeuble qui a connu un sinistre important après l’ordonnance d’expropriation, mais avant la prise de possession du bien par la Métropole. Une procédure de péril a été mise en œuvre par la Métropole. L’intéressante question que le Tribunal Administratif de Lyon a eu à trancher est de savoir à qui incombe la prise en charge des travaux engagés dans le cadre de la procédure de péril ?
Sur la procédure de péril
Le 23 janvier 2018 une ordonnance d’expropriation a été rendue au profit de la Métropole pour le transfert de la propriété d’un immeuble appartenant à une SCI. Au mois de juin 2019, avant que le juge de l’expropriation n’ait fixé le montant des indemnités et avant que la Métropole ne prenne formellement possession du bien, le bâtiment en cause a connu un effondrement important, et la Métropole a engagé une procédure de péril imminent et enjoint la SCI à réaliser des travaux et à mettre en œuvre des mesures provisoires d’urgence.
La SCI a réalisé et financé les travaux. Toutefois, estimant qu’à la date de l’arrêté de péril elle n’était plus propriétaire du bien, la SCI a contesté l’arrêté de péril imminent et demandé le remboursement des dépenses engagées au titre des travaux.
La SCI considérait pour sa part que l’ordonnance d’expropriation avait eu pour effet de transférer la propriété du bien à la Métropole et qu’à la date de l’arrêté de péril elle n’était plus propriétaire et que, donc, cet arrêté était mal dirigé.
La Métropole considérait, elle, que la fixation des indemnités par le juge de l’expropriation et le paiement du prix n’étant pas intervenus à la date de l’arrêté, la SCI restait gardien de l’immeuble et la dépossession ne pouvait être considérée comme intervenue à cette date.
Le TA de Lyon, par un jugement (TA Lyon, 30 juin 2020, n°1907747) a annulé l’arrêté de péril aux motifs que : « Quand bien même l’envoi en possession n’était pas encore intervenu en l’absence de décision du juge fixant le montant de l’indemnité d’expropriation et de paiement de cette dernière, cette ordonnance a éteint tous droit réels de la SCI sur cette parcelle et les constructions qui y étaient érigées. Par suite, et même si le transfert de propriété à la métropole de Lyon n’avait pas encore été transcrit au fichier immobilier, cette société n’avait plus la qualité de propriétaire du bien, au sens notamment, des dispositions de l’article L. 511-3 du CCH. En mettant en demeure, le 17 juin 2019, la SCI de procéder à des travaux sur cette parcelle, en raison de l’état de péril imminent des constructions qui y étaient érigés, la métropole de Lyon a commis une erreur de droit ».
Tirant les conséquences de l’illégalité de l’arrêté de péril imminent, le TA de Lyon a condamné la Métropole à rembourser à la SCI l’intégralité des sommes engagées par elle dans le cadre de la procédure de péril.
Sur la prise en charge financière des travaux
Reprenant le même raisonnement, le Tribunal Administratif de Lyon, par jugement distinct, (TA Lyon, 30 juin 2020, n°2000663) a estimé qu’il n’incombait pas à la SCI de réaliser les travaux de sécurisation prescrits par l’arrêté de péril imminent, travaux qui correspondaient strictement aux prescriptions dudit arrêté. Par suite, le Tribunal a considéré que la Métropole de Lyon avait commis une illégalité fautive en lien direct avec le préjudice subi par la SCI.
Le Tribunal Administratif a également jugé que ce préjudice n’était pas à l’origine d’un enrichissement sans cause de la SCI.
Par conséquent le Tribunal Administratif de Lyon a condamné la Métropole à verser à la SCI une indemnité de 55 589,35 euros, correspondant au montant des travaux engagés et financés par la SCI dans le cadre de l’arrêté de péril imminent.
Il ressort de ces deux jugements, que la qualité de propriétaire doit bien s’apprécier à la date de l’ordonnance d’expropriation, et non à la date de prise de possession du bien par la collectivité.