Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat rappelle que si le pouvoir adjudicateur est libre de définir la méthode de notation, celle-ci ne doit pas être de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération. Est entachée d’irrégularité une méthode de notation fondée en partie sur une auto-évaluation par les candidats
Conseil d’État, 22 novembre 2019, n°418460.
En l’espèce, la société Autocars Faure avait demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler le marché de services réguliers de transports publics non urbains de personnes par voie terrestre conclu entre le département de l’Isère et la société Cars Philibert.
Les premiers juges, comme les juges d’appel, ont rejeté cette demande et la société Autocars Faure s’est alors pourvue en cassation contre l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon.
Or, pour le jugement des offres, le pouvoir adjudicateur avait prévu que la notation de l’un des deux sous-critères de la valeur technique, dépendait exclusivement du niveau de qualité du service que le candidat s’estimait en mesure de garantir et ne résultait que de l’indication par le candidat lui-même d’une note dite » note qualité » qu’il devait s’attribuer à l’aide d’un outil de simulation.
Sur ce point, la cour administrative d’appel de Lyon avait estimé que, par le recours à une telle méthode de notation, le département de l’Isère n’avait pas renoncé à apprécier la valeur des offres au motif, d’une part, qu’il avait précisément défini et communiqué aux candidats les modalités selon lesquelles le sous-critère en litige serait apprécié et, d’autre part, que la note attribuée aux candidats avait vocation à servir de référence pour la détermination de leur note annuelle » qualité » et le calcul d’éventuelles pénalités en cas de manquement à cet engagement.
Tel n’est pas l’avis du Conseil d’Etat qui est venu rappeler que :
» 2. Le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en oeuvre de chacun des critères de sélection des offres qu’il a retenus et rendus publics. Toutefois, une méthode de notation est entachée d’irrégularité si, en méconnaissance des principes fondamentaux d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, elle est, par elle-même, de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération et est, de ce fait, susceptible de conduire, pour la mise en oeuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre, ou, au regard de l’ensemble des critères pondérés, à ce que l’offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie. Il en va ainsi alors même que le pouvoir adjudicateur, qui n’y est pas tenu, aurait rendu publique, dans l’avis d’appel à concurrence ou les documents de la consultation, une telle méthode de notation. »
Puis, faisant application de ce considérant de principe, le Conseil d’Etat indique clairement que :
« 3. Une méthode de notation des offres par laquelle le pouvoir adjudicateur laisse aux candidats le soin de fixer, pour l’un des critères ou sous-critères, la note qu’ils estiment devoir leur être attribuée est, par elle-même, de nature à priver de portée utile le critère ou sous-critère en cause si cette note ne peut donner lieu à vérification au stade de l’analyse des offres, quand bien même les documents de la consultation prévoiraient que le candidat attributaire qui ne respecterait pas, lors de l’exécution du marché, les engagements que cette note entend traduire pourrait, de ce fait, se voir infliger des pénalités. »