Le juge du référé mesures utiles peut être saisi pour prononcer toutes mesures de nature à garantir le caractère suspensif d’un recours administratif ou contentieux
Conseil d’Etat, 24 juillet 2019, n°426527
La Caisse d’allocations familiales de la Vienne a réclamé à Mme A, par une décision du 5 avril 2018, le remboursement de prestations sociales indûment perçues. Pour ce faire, elle l’a informé qu’elle opérerait, tous les mois, une retenue sur les prestations sociales qui lui sont versées.
Mme A a contesté cette décision par un recours administratif, rejeté par la CAF, pour ce qui concerne la prime d’activité le 18 juillet 2018 et par le Département pour ce qui concerne le RSA le 21 août 2018, puis par un recours contentieux en date du 17 septembre 2018.
Mme A a saisi, le 22 novembre 2018, sur le fondement des dispositions de l’article L.521-3 du code de justice administrative, le juge du référé mesures utiles d’une demande de suspension des retenues effectuées sur ses prestations sociales et d’injonction à rembourser les sommes retenues.
Par une ordonnance du 7 décembre 2018, le juge des référés a, d’une part, prononcé un non lieu à statuer sur la demande de suspension des retenues et, d’autre part, enjoint la CAF et le Département de restituer les sommes indûment retenues sur les prestations sociales.
Le Conseil d’Etat rappelle tout d’abord que le juge du référé mesures utiles peut prescrire à des fins conservatoires ou à titre provisoire toutes mesures que l’urgence justifie, notamment sous forme d’injonctions adressées à l’administration, à la condition que ces mesures soient utiles et ne se heurtent à aucune contestation sérieuse. En revanche, compte tenu du caractère subsidiaire de ce référé, le juge ne peut prescrire des mesures qui pourraient être obtenues par les procédures de référé suspension (article L.521-1 du code de justice administrative) ou de référé liberté (article L.521-2 du code de justice administrative).
Ainsi, le juge du référé mesures utiles peut prescrire à l’administration, à titre provisoire dans l’attente d’une décision se prononçant sur le bien-fondé du recours, toutes mesures justifiées par l’urgence propres à faire cesser la méconnaissance du caractère suspensif d’un recours. Le juge du référé mesures utiles peut ainsi être saisi dans l’hypothèse où, lorsque la loi prévoit le caractère suspension d’un recours administratif ou contentieux, l’administration poursuit l’exécution de la décision en dépit du recours engagé.
En l’espèce, les dispositions de l’article L.262-46 du code de l’action sociale et des familles prévoit expressément que les réclamations dirigées notamment contre une décision de récupération de l’indu ont un caractère suspensif.
Ainsi, dès lors que Mme A avait contesté la décision de répétition de l’indu, la CAF et le Département ne pouvaient plus solliciter le remboursement des sommes afférentes, notamment en effectuant des retenues sur les prestations sociales, dans l’attente de la décision du juge sur le bien-fondé du recours.
Par conséquent, Mme A pouvait utilement saisir le juge du référé mesures utiles et celui ci était fondé à enjoindre la CAF et le Département de restituer les sommes indûment retenues en méconnaissance du caractère suspensif du recours.
Le pourvoi formé par la CAF et le Département à l’encontre de l’ordonnance du juge des référés est donc rejeté.