Un acheteur peut exclure de la procédure de passation d’un marché public une personne pour son comportement lors de précédentes procédures.
Conseil d’Etat, 24 juin 2019, Département des Bouches-du-Rhône, n° 428866
En l’espèce, le Département des Bouches-du-Rhône a publié un avis d’appel public à la concurrence dans le cadre d’un marché à procédure adaptée. La société EGBTI réponds à l’appel d’offre et soumet une offre au Département. Celui-ci l’informe qu’elle est susceptible d’être exclue du marché. En effet lors de précédentes procédures de passation entre 2013 et 2016, son dirigeant de fait avait tenté d’influer sur le processus décisionnel. Ce comportement avait donné lieu à l’ouverture d’une information judiciaire dans laquelle le Département des Bouches-du-Rhône s’était porté partie civile. A ce titre, le Département enjoint à la société de lui fournir des éléments démontrant que ni son professionnalisme ni sa fiabilité ne pouvaient plus être mis en doute. La société répondra en contestant les motifs de l’exclusion mais n’apportera aucun élément démontrant « d’éventuelles mesures correctrices mise en oeuvre par la société« .
Au vu de ces éléments, le Département, par une décision du 31 mai 2019, décide d’exclure la société du marché litigieux. Celle-ci conteste cette exclusion et la procédure de passation du marché public par le biais d’un référé pré-contractuel devant le juge des référés du Tribunal administratif de Marseille. Celui-ci par une ordonnance du 28 février 2019 donne raison à la société et et annule la décision du Département d’exclure la société du marché ainsi que la procédure de passation. Le Département décide alors de contester cette ordonnance devant le Conseil d’Etat.
Le Conseil d’Etat va alors rappeler que les dispositions du 2° du I de l’article 48 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, reprise par l’article L. 2141-8 du Code de la commande publique prévoient que : » I. – Les acheteurs peuvent exclure de la procédure de passation du marché public : (…) 2° Les personnes qui ont entrepris d’influer indûment sur le processus décisionnel de l’acheteur ou d’obtenir des informations confidentielles susceptibles de leur donner un avantage indu lors de la procédure de passation du marché public, ou ont fourni des informations trompeuses susceptibles d’avoir une influence déterminante sur les décisions d’exclusion, de sélection ou d’attribution« .
La Haute juridiction estime que ces dispositions « ne réservent pas la faculté de mettre en oeuvre cette cause d’exclusion facultative au seul cas des agissements commis dans le cadre de la procédure de passation en cours« .
Ainsi, les exclusions prévues par l’ordonnance du 23 juillet 2015 reprises par les dispositions de l’article L. 2141-8 du Code de la commande publique permettent aux acheteurs d’exclure d’une procédure de passation « une personne qui peut être regardée, au vu d’éléments précis et circonstanciés, comme ayant, dans le cadre de la procédure de passation en cause ou dans le cadre d’autres procédures récentes de la commande publique, entrepris d’influencer la prise de décision de l’acheteur et qui n’a pas établi, en réponse à la demande que l’acheteur lui a adressée à cette fin, que son professionnalisme et sa fiabilité ne peuvent plus être mis en cause et que sa participation à la procédure n’est pas de nature à porter atteinte à l’égalité de traitement entre les candidats« .
Considérant que les éléments précis relevés à l’occasion de la passation de précédents marchés publics de travaux pouvaient conduire le département à douter de la probité du candidat et à craindre pour la régularité de la procédure en course, sans que la société ne produise d’éléments de nature à établir que son professionnalisme et sa fiabilité ne pouvaient plus être remis en cause, le Conseil d’Etat valide l’exclusion de la société par le Département. Il annule donc l’ordonnance du juge des référés et rejette la requête de la société.