Une demande de communication, formulée par un membre du conseil municipal, de documents se rattachant aux affaires de la commune adressée au directeur général des services (DGS) ne saurait être rejetée comme mal dirigée, dès lors qu’il lui reviendra de le transmettre au maire. Mais, pour que le maire soit tenu d’y faire droit, il faut que le document demandé soit réellement nécessaire pour l’exercice du mandat.
Conseil d’Etat, 5 avril 2019, Communauté intercommunale des villes solidaires, req. n° 416542
Monsieur B avait demandé, en qualité de conseiller communautaire de la communauté intercommunale des villes solidaires (CIVIS), par un courrier du 1er octobre 2016 adressé au Directeur général des services (DGS), la communication de documents concernant deux délibérations du conseil communautaire. Cette demande avait fait l’objet d’un refus implicite que ce dernier a contesté devant le Tribunal administratif.
Par un jugement du 12 octobre 2016, le Tribunal administratif de la Réunion a annulé la décision litigieuse en tant qu’elle porte refus de communication de l’étude de marché réalisée par la société AID Observatoire en avril 2015, de la lettre de la SPLA Grand Sud adressée à la CIVIS lui transmettant la demande d’acquisition de la société Holding Ethève et de l’intégralité des consultations juridiques réalisées au bénéfice de la CIVIS et de la SPLA Grand Sud se rapportant à la réalisation de la zone d’aménagement concerté de Pierrefonds Aérodrome, ainsi que des bons de commande de prestations juridiques afférents.
Le Conseil d’Etat saisi d’un pourvoi par la Communauté intercommunale rappelle qu’aux termes de l’article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales, applicable aux établissements publics de coopération intercommunale tels que la communauté intercommunale des villes solidaires en vertu de l’article L. 5211-1 du même code : » Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d’être informé des affaires de la commune qui font l’objet d’une délibération « .
En application de ces dispositions, le maire est tenu de communiquer aux membres du conseil municipal les documents nécessaires pour qu’ils puissent se prononcer utilement sur les affaires de la commune soumises à leur délibération.
Lorsqu’un membre du conseil municipal demande, sur le fondement de ces dispositions du code général des collectivités territoriales, la communication de documents, il appartient au maire sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, d’une part, d’apprécier si cette communication se rattache à une affaire de la commune qui fait l’objet d’une délibération du conseil municipal et, d’autre part, de s’assurer qu’aucun motif d’intérêt général n’y fait obstacle, avant de procéder, le cas échéant, à cette communication selon des modalités appropriées.
Dès lors qu’il appartient au maire d’apprécier s’il y a lieu de procéder à la communication, de telles demandes doivent en principe lui être adressées, sauf à ce qu’il ait arrêté des modalités de présentation différentes.
Toutefois, estime la Haute juridiction, « une demande adressée au Directeur Général des Services ne saurait être rejetée comme mal dirigée » dans la mesure où il lui revient de « la transmettre au maire pour qu’il puisse apprécier s’il y a lieu d’y donner suite ».
Saisi d’un litige, le juge doit donc apprécier si les documents demandés sont bien nécessaires à l’exercice du mandat.
En l’espèce, « en se bornant à constater, pour faire droit à la demande de communication, que les documents en cause étaient directement liés à des délibérations, sans rechercher, alors que les délibérations invoquées étaient antérieures à la date de la demande de communication, si les documents demandés pouvaient être regardés comme étant nécessaires pour que [l’élu requérant] puisse se prononcer utilement sur les affaires en cours de la collectivité, susceptibles de faire l’objet de délibérations à venir au cours desquelles les élus auraient à se prononcer sur les projets en cause, le tribunal commet une erreur de droit ».
En conséquence, le Conseil d’Etat censure le jugement du Tribunal administratif de la Réunion dès lors qu’il n’avait pas vérifié si les documents demandés pouvant être regardés comme nécessaires à l’élu pour l’exercice de son mandat.