Le Conseil d’Etat précise l’ordre de juridiction compétent en matière de recours des tiers contre la délibération d’un conseil municipal autorisant la conclusion d’une convention ayant pour objet la mise à disposition d’une dépendance du domaine privé communal et la décision du maire de la signer.
Le Conseil d’Etat précise également les règles de mise à disposition de locaux appartenant une Commune au profit d’une association cultuelle.
Conseil d’Etat, 7 mars 2019, n°417629
Par une délibération du 22 juin 2012, le conseil municipal de la commune de Valbonne a décidé de louer un local situé rue Henri Barbara à l’association » Musulmans de Valbonne Sophia Antipolis » en vue de l’exercice d’activités cultuelles et a autorisé le maire ou son représentant à signer une convention de location, qui a été signée le 31 juillet 2012. La délibération du 22 juin 2012 et la décision du maire de signer la convention, ont été annulées par le tribunal administratif de Nice, annulations qui ont été confirmées par la cour administrative d’appel de Marseille.
Le Conseil d’Etat juge en premier lieu que les locaux mis à la disposition de l’association » Musulmans de Valbonne Sophia Antipolis » appartiennent au domaine privé de la commune de Valbonne, sans que l’existence d’un projet d’installation dans ces locaux d’une gendarmerie qui ne pouvait être regardé comme entrepris de façon certaine ait une incidence sur l’appartenant de la parcelle au domaine privé.
Le Conseil d’Etat ajoute ensuite que si la contestation par une personne privée de l’acte, délibération ou décision du maire, par lequel une commune ou son représentant, gestionnaire du domaine privé, initie avec cette personne, conduit ou termine une relation contractuelle dont l’objet est la valorisation ou la protection de ce domaine et qui n’affecte ni son périmètre ni sa consistance relève de la compétence du juge judiciaire, la juridiction administrative est compétente pour connaître de la demande formée par un tiers tendant à l’annulation de la délibération d’un conseil municipal autorisant la conclusion d’une convention ayant pour objet la mise à disposition d’une dépendance du domaine privé communal et de la décision du maire de la signer.
Le Conseil d’Etat rappelle ensuite que les dispositions de l’article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales permettent à une commune, en tenant compte des nécessités de l’administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l’ordre public, d’autoriser, dans le respect du principe de neutralité à l’égard des cultes et du principe d’égalité, l’utilisation pour l’exercice d’un culte par une association d’un local communal, (c’est-à-dire, pour l’application de ces dispositions, affectés aux services publics communaux), dès lors que les conditions financières de cette autorisation excluent toute libéralité et, par suite, toute aide à un culte.
Le Conseil d’Etat précise qu’une commune ne peut rejeter une demande d’utilisation d’un tel local au seul motif que cette demande lui est adressée par une association dans le but d’exercer un culte. Mais à l’inverse, une commune ne peut, sans méconnaître ces dispositions, décider qu’un local lui appartenant relevant des dispositions précitées de l’article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales sera laissé de façon exclusive et pérenne à la disposition d’une association pour l’exercice d’un culte et constituera ainsi un édifice cultuel.
Le Conseil d’Etat ajoute que les collectivités territoriales peuvent en revanche donner à bail, et ainsi pour un usage exclusif et pérenne, à une association cultuelle un local existant de leur domaine privé sans méconnaître les dispositions précitées de la loi du 9 décembre 1905 dès lors que les conditions, notamment financières, de cette location excluent toute libéralité.
En l’espèce, le Conseil d’Etat annule l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille au motif qu’elle a commis une erreur de droit : en effet, pour confirmer l’annulation de la délibération du 22 juin 2012 et de la décision du 31 juillet 2012 prononcée par le jugement du tribunal administratif de Nice, la cour administrative d’appel de Marseille s’est fondée sur ce que la commune de Valbonne ne pouvait mettre à disposition exclusive et pérenne au profit d’une association cultuelle des locaux appartenant à cette commune. Or, les locaux mis à la disposition de l’association » Musulmans de Valbonne Sophia Antipolis » appartiennent au domaine privé de la commune et ne relèvent pas des dispositions précitées de l’article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales.
L’affaire est renvoyée à la Cour administrative d’appel de Marseille pour vérifier que la Commune pouvait donner à bail (pour un usage exclusif et pérenne), à l’association cultuelle le local en question et que cette location exclut bien toute libéralité.