La règle selon laquelle une décision implicite de rejet relevant du plein contentieux fait désormais courir le délai de recours contentieux n’est applicable qu’aux décisions implicites nées après l’entrée en vigueur du décret JADE, soit postérieurement au 1er janvier 2017.
Conseil d’Etat, avis, 30 janvier 2019, n° 420797
L’article R. 421-3 du code de justice administrative prévoyait une exception importante, pour les décisions relevant du plein contentieux, à la règle selon laquelle une décision implicite de rejet née du silence gardé par l’administration fait courir le délai de recours contentieux (article R. 421-2 CJA). Ainsi, en matière de plein contentieux, seule une décision expresse de rejet était de nature à faire courir ce délai.
Le décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 portant modification du code de justice administrative, dit décret « JADE », a supprimé cette exception, ce qui signifie que le rejet implicite d’une demande relevant du plein contentieux est de nature à faire courir les délais de recours contentieux.
Le Tribunal Administratif de PAU a transmis au Conseil d’État, en application de l’article L. 113-1 du CJA, une question de droit portant sur les conditions d’entrée en vigueur de la suppression de cette exception, qui a pour effet de soumettre au droit commun, pour la naissance des délais de recours, les décisions implicites dont la contestation relèvent du plein contentieux, en particulier les refus tacitement opposés à une demande indemnitaire.
Logiquement, le Conseil d’État considère que :
- s’agissant des décisions implicites relevant du plein contentieux qui sont nées à compter de la date d’entrée en vigueur du décret JADE, soit le 1er janvier 2017, la nouvelle règle selon laquelle le délai de recours de deux mois court à compter de la date où elles sont nées, leur est applicable ;
- s’agissant des refus implicites nés avant le 1er janvier 2017 relevant du plein contentieux, « le décret du 2 novembre 2016 n’a pas fait – et n’aurait pu légalement faire – courir le délai de recours contre ces décisions à compter de la date à laquelle elles sont nées», la nouvelle règle ne leur étant pas applicable.
Toutefois, le Conseil d’État tempère son avis en disant que « les dispositions du II de l’article 35 du décret du 2 novembre 2016, qui prévoient l’application de la nouvelle règle à toute requête enregistrée à compter du 1er janvier 2017, ont entendu permettre la suppression immédiate, pour toutes les situations qui n’étaient pas constituées à cette date, de l’exception à la règle de l’article R. 421-2 du code de justice administrative dont bénéficiaient les matières de plein contentieux ».
Le Conseil d’État considère que, en conséquence, un délai de recours de deux mois court à compter du 1er janvier 2017, contre toute décision implicite relevant du plein contentieux qui serait née antérieurement à cette date
Pour justifier cette position, il affirme que l’ancienne réglementation « ne créait pas de droit acquis à ce que tout refus tacite antérieur reste, en matière de plein contentieux, indéfiniment susceptible d’être contesté », mais « conférait seulement aux intéressés le droit à ce que le délai de recours contre un tel refus ne courre qu’à compter du moment où, ainsi qu’il a été dit, ce refus était explicitement et régulièrement porté à leur connaissance ».